Dans la vie faut pas s’en faire…

De gauche à droite : Albert Willemetz, René Koval, Arthur Honegger, Louis Blanche, Dorville, Moussia, Fred Pasquali, lors de la production des Aventures du Roi Pausole

Grand auteur d’opérettes, parolier prolixe,

Albert Willemetz a écrit pour les grandes vedettes de la chanson de la première moitié du XXe siècle. Il a participé à cette démarche qui du café-concert et du cabaret, d’un bond a conduit sur les planches du Music-Hall, la chanson française.

Il est né, en 1887, à Paris. La construction de la Tour Eiffel a commencé en janvier, car elle devait être prête pour l’exposition de 1889. Le 14 février, jour de sa naissance, le journal Le Temps publiait une lettre ouverte signée par Alexandre Dumas fils, Charles Garnier, Charles Gounod, Guy de Maupassant, Victorien Sardou, Emile Zola et d’autres… contre la Tour Eiffel…

Célèbre opérette Phi-Phi

La première de sa célèbre opérette Phi-Phi, écrite sur une musique de Christiné, était annoncée pour le 11 novembre 1918 aux Bouffes Parisiens. Pour cause d’armistice, la générale aura lieu en matinée le 12 novembre. Tout Paris fête la fin de la guerre et se retrouve pour le spectacle, de Mayol à Henri Bergson. Le succès est immense.

Maurice Chevalier a assisté lui aussi, avec enthousiasme à la première de Phi-Phi. Né une année après lui, il sera son ami et son voisin, à Marne la Coquette, dans les années 50.

L’opérette Dédé

En 1921, Maurice Chevalier va interpréter dans l’opérette Dédé (créée aux Bouffes-Parisiens sur une musique de Christiné) le célèbre titre Dans la vie faut pas s’en faire :

Dans la vie faut pas s’en faire :
Moi je m’en fait pas !
Ces p’tit’s misères
Seront passagères…
Tout ça s’arrang’ra !
Je n’ai pas un caractère
A m’faire du tracas :
Croyez-moi, sur terre,
Faut jamais, s’en faire :
Moi, je n’m’en fais pas…

Willemetz possède l’art de la formule. Ainsi, Maurice Chevalier chante Si vous n’aimez pas ça, n’en dégoutez pas les autres !, dans l’opérette La-Haut ! (aux Bouffes-Parisiens, 1923, musique de Christiné) où il joue aux côtés de Dranem et Gabin père.

Valentine

Les succès de son interprète s’enchaînent. En 1925, c’est au tour de Valentine (musique de Henri Christiné). La chanson, traversera l’Atlantique. Elle figurera dans le film de Richard Wallace: La Chanson de Paris (Innocents of Paris), tourné avec Maurice Chevalier, aux Etats-Unis, aux studios Paramount, en 1929.
Elle avait de tout petits petons,
Valentine,
Valentine,
Elle avait de tout petits petons
Que je tatais à tâtons
Ton ton tontaine,
Elle avait un tout petit menton
Valentine,
Valentine,
Outre ses petits petons,
Ses p’tits tétons,
Son p’tit menton,
Elle était frisée comme un mouton !

On peut citer, encore, du même interprète : Les Mirlitons (1935 au Casino de Paris) dans la revue Parade du monde illustrée par Kiffer.

Mon homme

Maurice Chevalier a noué, en 1911, une relation d’une dizaine d’années avec Mistinguett. Elle interprétait en 1920-1921 au Casino de Paris, le célèbre : Mon Homme dans la revue : Paris qui Jazz, sur une musique de Maurice Yvain :

Sur cette terr’, ma seul’ joie, mon seul bonheur,
C’est mon homme !…
J’l’ai tellement dans la peau
Qu’j’en d’viens marteau…

On peut signaler aussi Tout ça n’arrive qu’à moi (en 1933 au Folies Bergères dans la revue Folies en folie.

Félicie aussi

L’humour de Willemetz, lui fait écrire, en 1939, ce petit bijou hilarant interprété par Fernandel : Félicie aussi, sur une musique de Casimir Oberfeld :

C’est dans un coin de Boulogne
Que j’ai rencontré Félicie.
Elle arrivait de la Bourgogne
Et moi j’arrivai en taxi.
Je trouvais vite une occasion
D’engager la conversation
Il faisait un temps superbe,
Je me suis assis sur l’herbe,
Félicie aussi…

Parmi ses amis proches, on peut citer les compositeurs : Raoul Moretti et André Messager. Mais aussi Sacha Guitry qui épousera Yvonne Printemps en 1919. Elle sera, elle aussi, une des interprètes de Willemetz et chantera : Mon rêve était d’avoir… un amant dans le film de Fernand Rivers La Dame aux camélias (1934).


On peut encore citer Arletty chantant de sa voix aux intonations si particulières : Mais en attendant… en 1950 à l’Empire.

Voici un tout petit aperçu de l’immense talent d’Albert Willemetz. Il convient de préciser, également, qu’il a dirigé Les Bouffes Parisiens de 1928 à 1958. Il était très impliqué dans la vie artistique.

Il sera élu et réélu président de la Sacem de 1946 à 1956. Cette année là, il succédera à Arthur Honegger, qui venait de mourir, à la Confédération internationale des sociétés d’auteurs et compositeurs.

Bibliographie et sources

Les ouvrages de Jacqueline Willemetz, sa petite fille vous permettrons d’en savoir plus sur cet homme qui selon Benoit Duteurtre « a inventé la comédie musicale ». Elle veille sur cet héritage sonore et a créé la fondation Willemetz qui réunit les archives familiales. Plus de 2300 chansons ont ainsi été répertoriées, à ce jour ! Elle est l’auteur de :
Albert Willemetz, J’ai chanté… la vie !, éditions L’Harmattan, Paris, 2014. Cet ouvrage existe en version papier et numérique.
Willemetz le prince des années folles, éditions Michalon, Paris, 1995.
Le catalogue raisonné d’Albert Willemetz, a été publié en 2004 aux éditions Salabert, Paris.